Comment la gestion et le traitement des données peuvent-ils aider les collectivités à mieux connaître leur territoire et à adapter les services proposés aux administrés ? Quels défis peuvent-ils permettre de relever ? Éléments de réponse avec la troisième table-ronde des Assises 2022, préparée et animée par Ariel Gomez, rédacteur en chef Smart City Mag.
Le numérique au service de centres urbains plus durables
Les territoires connectés, également appelés territoires intelligents ou smart cities, constituent une évolution urbanistique et sociétale à la fois inéluctable et nécessaire pour relever le double défi démographique et climatique. À date, un humain sur deux est citadin, une proportion qui montera à sept sur dix en 2050. Or les villes sont responsables de 60 % des émissions de gaz à effet de serre et de 78 % de la consommation énergétique. Il est donc crucial de rendre les centres urbains plus durables et, dans cette optique, les objets connectés font partie de la boite à outil des élus territoriaux. Les données qu’ils permettent de récolter constituent en effet une précieuse aide à la décision en matière de politique publique.
Vers des solutions interopérables et souveraines
Qui dit territoires connectés dit, pour commencer, infrastructure technique, avec la mise en place de dispositifs interopérables, ouverts et souverains, sur lesquels vont s’adosser les technologies de captation et de stockage des données. L’une des expérimentations en cours consiste à digitaliser l’infrastructure urbaine sur un parcours de 3,5 km dans Paris. « Objectif : explorer le champ des possibles en matière de cas d’usages à travers un véritable laboratoire grandeur nature. Avec en ligne de mire la possibilité d’adapter ce modèle aux différentes problématiques rencontrées par les territoires » a expliqué Laurent Benet, Directeur Stratégie Innovation – ATC France.
Des initiatives novatrices dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines
Sur le terrain, les collectivités agissent déjà, à l’image de la direction des Bâtiments des Hauts-de-Seine, qui a initié en 2017 une opération de mesure à grande échelle de la température et de l’humidité dans les collèges du département. « Grâce à cette campagne, nous avons pu centraliser nos contrats d’exploitation, formaliser des objectifs de performance énergétique pour chaque établissement, et enfin mesurer les effets de ce plan d’action à travers notamment des sondes posées dans les établissements » a indiqué Cyril Roussel, Chef d’unité gestion de l’énergie, direction des bâtiments des Hauts-de-Seine. Dans le cadre de cette démarche, la donnée a donc permis de documenter les décisions politiques en ciblant plus efficacement les points d’amélioration, mais elle a aussi rendu possible la vérification, après coup, de l’efficacité des travaux réalisés, avec notamment dès la première année des économies de l’ordre de 10%.
Autre exemple présenté, le projet Cyria à Saint-Cyr l’École, qui utilise les caméras de vidéoprotection en place pour compter et classifier par catégories les différents véhicules circulant sur le territoire communal : une plateforme innovante, qui se veut une mine d’information objective pour la municipalité. « Avec les outils connectés, une ville peut quantifier et objectiver certaines données qui relèvent souvent du ressenti des habitants, afin de prendre des décisions éclairées. Dans le cadre du projet Cyria, nous ambitionnons par exemple à moyen terme de pouvoir tester virtuellement des scénarios de circulation, comme le passage en sens unique d’une rue » a précisé Cyrille Fonvielle, Directeur de Cabinet et de l’Innovation Territoriale – Mairie de Saint-Cyr-l’Ecole en charge du projet Cyria.
Une mutualisation des services désormais possible
Cyria en est l’illustration : les outils de vidéoprotection déjà déployés, tout comme les éléments d’infrastructure urbaine qu’il est possible de digitaliser (feux, lampadaires) constituent des bases sur lesquelles s’appuie aujourd’hui le développement des territoires connectés. Mobilité, trafic, stationnement, qualité de l’air, gestion des ressources : la liste est longue des sujets sur lesquels le numérique va permettre de progresser, et l’Association Nationale de la Vidéoprotection (AN2V) a recensé en ce sens pas moins de 164 cas d’usage ! « Aujourd’hui, les technologies sont au point en matière de territoires connectés. La balle est dans le camp des collectivités, à charge pour elles de décider ce qu’elles veulent (ou non) mettre en place, mais aussi comment elles s’organisent pour mutualiser les services afin de les rendre financièrement accessibles » a ajouté Dominique Legrand, Président de l’AN2V. La bonne nouvelle pour les collectivités : grâce à l’évolution du cadre législatif (article 42 de la loi de sécurité globale), un opérateur comme Seine-et-Yvelines Numérique peut désormais leur proposer des services de vidéoprotection de la voie publique mutualisés, rendant ainsi ces nouvelles technologies accessibles au plus grand nombre. Ce nouveau contexte réglementaire est favorable au développement de solutions à grande échelle initiées par les collectivités territoriales : une nécessité dans un monde où les GAFAM* demeurent encore trop souvent les seuls acteurs de référence, avec le risque de perte de souveraineté que cela induit. « En matière d’infrastructure et d’outils numériques, les collectivités ont donc intérêt à bannir toutes les solutions qui ne sont pas interopérables et à se battre pour la souveraineté sur leurs données, celles-ci constituant un patrimoine à part entière » a conclu Stéphan Guidarini, Business Unit Manager – Axians. ■
*GAFAM = Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft
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